Le roc et la charrue
Publié : 20 février 2017, 11:02
Poésie.
Le roc et la charrue.
Une charrue s'ennuyait sur son aire d'herbe froissée
Sous le soleil brûlant au milieu de l'été
Temps de repos pour elle, de labeur déserté,
Elle rêvait docile sous la voûte azurée.
La tête d'un rocher affleurait l'herbe rase,
Ci bien qu'à cet endroit la terre était à nue,
Et la roche pleurait transpirant sur sa base
Ce tertre sans couvert qu'elle était devenue.
Chaque gémissement la faisait sursauter
Entraînant la charrue dans le peureux hoquet,
La masse d'acier saoule d'être secouée
Vint à laisser couler sa colère rentrée.
« Oh ! Du rocher ! Ne peux-tu pas cesser de sursauter ?
-Tes bonds me surprenant me donnent le tournis
-Et aussi quelque-part un début de nausée...
-Ils m'indisposent vois-tu tes sauts de cabris.
- Dame je ne voulais vous être détestable
- Mais ce n'est point ma faute si je suis instable
- Car au dessous de moi mes frères poussent immuables
- De leurs épaules rondes des forces insurmontables.
La charrue éclata d'un rire cristallin
Qui se répercuta sur ses oreilles d'acier :
- Pauvre petit rocher qui veut jouer au malin !
- Que sais-tu sombre idiot du noir dessous tes pieds ?
- J'en sais, dame d'acier, plus que vous ne croyez
- Car tout roc grossit dans l'encre de la nuit,
- Il n'est que le soleil pour couper nos envies
- De géants devenir à toute l'éternité.
- Donc si je te comprends, tu es la force vive
- Robustesse invincible, nul ne peut t'affronter !
- Mais crois-tu parvenir à l'acier résister
- Lorsque mon tour viendra et qu'enfin je ne vive ?
- Bah ! Je saurai faire crier ta mâchoire infernale
- Faire plier tes crocs et ton âge bancal
- Ne me pousses pas trop jusqu'au combat fatal
- Car tu seras surprise de mes forces vitales »
Pendant quelques semaines ils s'étrillèrent ainsi,
Temps de la fenaison et des moissons bénies
Récolte des légumes et des paniers de fruits
Que le soleil radieux avait longtemps mûris.
L'homme fit enfin ronfler le moteur ravageur,
Attelant la charrue sur des bras accrocheurs,
Graissée et bichonnée elle minauda la belle
Savourant la terre blonde de ses canines cruelles.
« Fais gaffe, dit le rocher, en roulant sur mon crâne
- De ne pas dégrader ma chevelure de roches
- Ne pas faire sonner en moi toutes les cloches
- Me forçant à braire comme ferait un âne..
La charrue se tordit de rire sur son âge,
Trépignant en gloussant sous les brises sifflantes ;
-Qu'importe, lui dit-elle, j'essaierai d'être sage
- De n'arracher de toi que des mèches naissantes »
Toute la journée ils roulèrent en long
Tournant la grasse terre à brassée de sillons,
Chamboulant quelques pierres, quelques grossiers moellons
Gisant là sur la plaine infâmes et moribonds.
Vers le soir les crocs égratignèrent la pierre
Juste une balafre, une petite misère,
Au passage suivant raclèrent durement
La roche qui pleura en longs gémissements.
Quand le monstre revint à l'assaut du sillon,
Le géant souterrain batailleur tint le front
Les socs dévastateurs accrochés au fronton
Ne purent s'arracher des ignobles crampons.
L'acier grinça des dents, l'âge se distendit,
Se tordant se crispant toute force tendue
Aux lourds ahanements du moteur asservi
Suivi le hurlement de l'âge enfin rompu.
La charrue disloquée gisait sur le sol nu
Déjà morte de vie, espérance vaincue,
Tandis que le rocher calme et ragaillardi
Respirait de concert sa splendeur infinie.
« Vois, dit-il déçu, je t'avais prévenue
- Tu n'étais pas de taille à me faire trembler,
- car madame nature ne peut que résister
- A l'immonde présage où vos maîtres évoluent »
La charrue rendit l'âme dans un dernier soupir
Le rocher de tristesse se laissa dépérir,
Il rabattit sur lui sa casquette de terre...
S'endormit solitaire dans son antre de pierres.
…............................16 17. 02 . 017
…...................................................................................................................................
Le cycle de la lune
La lune se promenait sur le ciel étoilé,
Sur le trottoir de l'aube dans les premiers reflets
Perdant dans les lueurs des prémices du jour
Sa robe de dorures son châle de flou velours.
Sur l'horizon frisaient les vagues du soleil
Qui ramaient les nuages aux portes des cités,
Bercées par les embruns, le sel des chants vermeil
Que les sirènes frivoles semaient comme des blés.
Sur le char d'Apollon l'azur reprenait vie,
La lune se pressait de rejoindre son lit
Mais hélas fatiguée par sa trop longue nuit,
Elle chuta lourdement loin de son paradis.
Habillée en batistes rousses et aurifères,
Mutine et transparente en soieries éphémères
Dame lune posait dans la bleutée partielle
Comme reine à la cour en charmante merveille.
Sur son char, Ra le roi aiguise ses lances d'or,
Affûte ses couteaux, protège ses trésors ;
Lissant sur son passage les océans les ports,
Les vallées les ravins où l'ombre dort encore.
Puis il prit par la main dame lune flétrie
La poussant rayonnant vers sa prochaine nuit,
S'amusant, s'essoufflant de la randonnée folle
Sous l'alcôve irisée des complaintes d’Éole.
Ils prirent rendez-vous pour un prochain regard,
Une ballade aux étoiles, une nuit sur le tard...
La lune resta seule car le soleil ne vint
Rejoindre la complice des voyages divins.
La dame à l'univers pleure son triste enfer
Quand les larmes embrument ses images de rêves
Qu'il ne reste d'elle qu'un filament de sève
Pour recueillir jaloux ses perlettes de verre.
….................19 . 02. 017
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Le roc et la charrue.
Une charrue s'ennuyait sur son aire d'herbe froissée
Sous le soleil brûlant au milieu de l'été
Temps de repos pour elle, de labeur déserté,
Elle rêvait docile sous la voûte azurée.
La tête d'un rocher affleurait l'herbe rase,
Ci bien qu'à cet endroit la terre était à nue,
Et la roche pleurait transpirant sur sa base
Ce tertre sans couvert qu'elle était devenue.
Chaque gémissement la faisait sursauter
Entraînant la charrue dans le peureux hoquet,
La masse d'acier saoule d'être secouée
Vint à laisser couler sa colère rentrée.
« Oh ! Du rocher ! Ne peux-tu pas cesser de sursauter ?
-Tes bonds me surprenant me donnent le tournis
-Et aussi quelque-part un début de nausée...
-Ils m'indisposent vois-tu tes sauts de cabris.
- Dame je ne voulais vous être détestable
- Mais ce n'est point ma faute si je suis instable
- Car au dessous de moi mes frères poussent immuables
- De leurs épaules rondes des forces insurmontables.
La charrue éclata d'un rire cristallin
Qui se répercuta sur ses oreilles d'acier :
- Pauvre petit rocher qui veut jouer au malin !
- Que sais-tu sombre idiot du noir dessous tes pieds ?
- J'en sais, dame d'acier, plus que vous ne croyez
- Car tout roc grossit dans l'encre de la nuit,
- Il n'est que le soleil pour couper nos envies
- De géants devenir à toute l'éternité.
- Donc si je te comprends, tu es la force vive
- Robustesse invincible, nul ne peut t'affronter !
- Mais crois-tu parvenir à l'acier résister
- Lorsque mon tour viendra et qu'enfin je ne vive ?
- Bah ! Je saurai faire crier ta mâchoire infernale
- Faire plier tes crocs et ton âge bancal
- Ne me pousses pas trop jusqu'au combat fatal
- Car tu seras surprise de mes forces vitales »
Pendant quelques semaines ils s'étrillèrent ainsi,
Temps de la fenaison et des moissons bénies
Récolte des légumes et des paniers de fruits
Que le soleil radieux avait longtemps mûris.
L'homme fit enfin ronfler le moteur ravageur,
Attelant la charrue sur des bras accrocheurs,
Graissée et bichonnée elle minauda la belle
Savourant la terre blonde de ses canines cruelles.
« Fais gaffe, dit le rocher, en roulant sur mon crâne
- De ne pas dégrader ma chevelure de roches
- Ne pas faire sonner en moi toutes les cloches
- Me forçant à braire comme ferait un âne..
La charrue se tordit de rire sur son âge,
Trépignant en gloussant sous les brises sifflantes ;
-Qu'importe, lui dit-elle, j'essaierai d'être sage
- De n'arracher de toi que des mèches naissantes »
Toute la journée ils roulèrent en long
Tournant la grasse terre à brassée de sillons,
Chamboulant quelques pierres, quelques grossiers moellons
Gisant là sur la plaine infâmes et moribonds.
Vers le soir les crocs égratignèrent la pierre
Juste une balafre, une petite misère,
Au passage suivant raclèrent durement
La roche qui pleura en longs gémissements.
Quand le monstre revint à l'assaut du sillon,
Le géant souterrain batailleur tint le front
Les socs dévastateurs accrochés au fronton
Ne purent s'arracher des ignobles crampons.
L'acier grinça des dents, l'âge se distendit,
Se tordant se crispant toute force tendue
Aux lourds ahanements du moteur asservi
Suivi le hurlement de l'âge enfin rompu.
La charrue disloquée gisait sur le sol nu
Déjà morte de vie, espérance vaincue,
Tandis que le rocher calme et ragaillardi
Respirait de concert sa splendeur infinie.
« Vois, dit-il déçu, je t'avais prévenue
- Tu n'étais pas de taille à me faire trembler,
- car madame nature ne peut que résister
- A l'immonde présage où vos maîtres évoluent »
La charrue rendit l'âme dans un dernier soupir
Le rocher de tristesse se laissa dépérir,
Il rabattit sur lui sa casquette de terre...
S'endormit solitaire dans son antre de pierres.
…............................16 17. 02 . 017
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Le cycle de la lune
La lune se promenait sur le ciel étoilé,
Sur le trottoir de l'aube dans les premiers reflets
Perdant dans les lueurs des prémices du jour
Sa robe de dorures son châle de flou velours.
Sur l'horizon frisaient les vagues du soleil
Qui ramaient les nuages aux portes des cités,
Bercées par les embruns, le sel des chants vermeil
Que les sirènes frivoles semaient comme des blés.
Sur le char d'Apollon l'azur reprenait vie,
La lune se pressait de rejoindre son lit
Mais hélas fatiguée par sa trop longue nuit,
Elle chuta lourdement loin de son paradis.
Habillée en batistes rousses et aurifères,
Mutine et transparente en soieries éphémères
Dame lune posait dans la bleutée partielle
Comme reine à la cour en charmante merveille.
Sur son char, Ra le roi aiguise ses lances d'or,
Affûte ses couteaux, protège ses trésors ;
Lissant sur son passage les océans les ports,
Les vallées les ravins où l'ombre dort encore.
Puis il prit par la main dame lune flétrie
La poussant rayonnant vers sa prochaine nuit,
S'amusant, s'essoufflant de la randonnée folle
Sous l'alcôve irisée des complaintes d’Éole.
Ils prirent rendez-vous pour un prochain regard,
Une ballade aux étoiles, une nuit sur le tard...
La lune resta seule car le soleil ne vint
Rejoindre la complice des voyages divins.
La dame à l'univers pleure son triste enfer
Quand les larmes embrument ses images de rêves
Qu'il ne reste d'elle qu'un filament de sève
Pour recueillir jaloux ses perlettes de verre.
….................19 . 02. 017
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