Poésies (mont)parnassiennes

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Re: Poésies (mont)parnassiennes

Message par Montparnasse »

LES EFFARÉS

Noirs dans la neige et dans la brume,
Au grand soupirail qui s’allume,
Leurs culs en rond,

À genoux, cinq petits, — misère ! —
Regardent le boulanger faire
Le lourd pain blond…

Ils voient le fort bras blanc qui tourne
La pâte grise, et qui l’enfourne
Dans un trou clair.

Ils écoutent le bon pain cuire.
Le boulanger au gras sourire
Chante un vieil air.

Ils sont blottis, pas un ne bouge,
Au souffle du soupirail rouge,
Chaud comme un sein.

Et quand, pendant que minuit sonne,
Façonné, pétillant et jaune,
On sort le pain ;

Quand, sous les poutres enfumées,
Chantent les croûtes parfumées,
Et les grillons ;

Quand ce trou chaud souffle la vie ;
Ils ont leur âme si ravie
Sous leurs haillons,

Ils se ressentent si bien vivre,
Les pauvres petits pleins de givre !
— Qu’ils sont là, tous,

Collant leurs petits museaux roses
Au grillage, chantant des choses,
Entre les trous,

Mais bien bas, — comme une prière…
Repliés vers cette lumière
Du ciel rouvert,

— Si fort, qu’ils crèvent leur culotte,
— Et que leur lange blanc tremblotte
Au vent d’hiver…

(A. Rimbaud, Poésies, 1870)
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Re: Poésies (mont)parnassiennes

Message par Montparnasse »

PREMIÈRES COMMUNIONS

I

Vraiment, c’est bête, ces églises de villages
Où quinze laids marmots, encrassant les piliers,
Écoutent, grasseyant les divins babillages,
Un noir grotesque dont fermentent les souliers.
Mais le soleil éveille, à travers les feuillages,
Les vieilles couleurs des vitraux ensoleillés,

La pierre sent toujours la terre maternelle,
Vous verrez des monceaux de ces cailloux terreux
Dans la campagne en rut qui frémit, solennelle,
Portant, près des blés lourds, dans les sentiers séreux,
Ces arbrisseaux brûlés où bleuit la prunelle,
Des nœuds de mûriers noirs et de rosiers furieux.

Tous les cent ans on rend ces granges respectables
Par un badigeon d’eau bleue et de lait caillé.
Si des mysticités grotesques sont notables
Près de la Notre-Dame ou du saint empaillé,
Des mouches sentant bon l’auberge et les étables
Se gorgent de cire au plancher ensoleillé.

L’enfant se doit surtout à la maison, famille
Des soins naïfs, des bons travaux abrutissants.
Ils sortent, oubliant que la peau leur fourmille
Où le Prêtre du Christ plaqua ses doigts puissants.
On paie au Prêtre un toit ombré d’une charmille
Pour qu’il laisse au soleil tous ces fronts bruissants.

Le premier habit noir, le plus beau jour de tartes
Sous le Napoléon ou le Petit Tambour,
Quelque enluminure où les Josephs et les Marthes
Tirent la langue avec un excessif amour
Et qui joindront aux jours de science deux cartes,
Ces deux seuls souvenirs lui restent du grand jour.

Les filles vont toujours à l’église, contentes
De s’entendre appeler garces par les garçons
Qui font du genre, après messe et vêpres chantantes,
Eux, qui sont destinés au chic des garnisons,
Ils narguent au café les maisons importantes,
Blousés neuf et gueulant d’effroyables chansons.

Cependant le curé choisit, pour les enfances,
Des dessins ; dans son clos, les vêpres dites, quand
L’air s’emplit du lointain nasillement des danses,
Il se sent, en dépit des célestes défenses.
Les doigts de pied ravis et le mollet marquant…
— La nuit vient, noir pirate aux ciel noir débarquant.

II

Le prêtre a distingué, parmi les catéchistes
Congrégés des faubourgs ou des riches quartiers,
Cette petite fille inconnue, aux yeux tristes,
Front jaune. Ses parents semblent de doux portiers.
Au grand jour, la marquant parmi les catéchistes,
Dieu fera, sur son front, neiger ses bénitiers.

La veille du grand jour, l’enfant se fait malade
Mieux qu’à l’église haute aux funèbres rumeurs.
D’abord le frisson vient, le lit n’étant pas fade,
Un frisson surhumain qui retourne : Je meurs…

Et, comme un vol d’amour fait à ses sœurs stupides,
Elle compte, abattue et les mains sur son cœur,
Ses Anges, ses Jésus et ses Vierges nitides,
Et, calmement, son âme a bu tout son vainqueur.

Adonaï !… — Dans les terminaisons latines
Des cieux moirés de vert baignent les Fronts vermeils
Et tachés du sang pur des célestes poitrines,
De grands linges neigeux tombent sur les soleils.

Pour ses virginités présentes et futures
Elle mord aux fraîcheurs de ta Rémission ;
Mais plus que les lys d’eau, plus que les confitures
Tes pardons sont glacés, ô Reine de Sion.

III

Puis la Vierge n’est plus que la Vierge du livre ;
Les mystiques élans se cassent quelquefois,
Et vient la pauvreté des images que cuivre
L’ennui, l’enluminure atroce et les vieux bois.

Des curiosités vaguement impudiques
Épouvantent le rêve aux chastes bleuités
Qui sont surpris autour des célestes tuniques
Du linge dont Jésus voile ses nudités.

Elle veut, elle veut pourtant, l’âme en détresse,
Le front dans l’oreiller creusé par les cris sourds,
Prolonger les éclairs suprêmes de tendresse
Et bave… — L’ombre emplit les maisons et les cours,

Et l’enfant ne peut plus. Elle s’agite et cambre
Les reins, et d’une main ouvre le rideau bleu
Pour amener un peu la fraîcheur de la chambre
Sous le drap, vers son ventre et sa poitrine en feu.

IV

À son réveil, — minuit, — la fenêtre était blanche
Devant le soleil bleu des rideaux illunés ;
La vision la prit des langueurs du Dimanche,
Elle avait rêvé rouge. Elle saigna du nez,

Et se sentant bien chaste et pleine de faiblesse,
Pour savourer en Dieu son amour revenant,
Elle eut soif de la nuit forte où s’exalte et s’abaisse
Le cœur, sous l’œil des cieux doux, en les devinant ;

De la nuit, Vierge-Mère impalpable, qui baigne
Tous les jeunes émois de ses silences gris ;
Elle eut soif de la nuit forte où le cœur qui saigne
Écoute sans témoin sa révolte sans cris.

Et, faisant la victime et la petite épouse,
Son étoile la vit, une chandelle aux doigts,
Descendre dans la cour où séchait une blouse,
Spectre blanc, et lever les spectres noirs des toits.

V

Elle passa sa nuit Sainte dans des latrines.
Vers la chandelle, aux trous du toit, coulait l’air blanc,
Et quelque vigne folle aux noirceurs purpurines
En deçà d’une cour voisine s’écroulant.

La lucarne faisait un cœur de lueur vive
Dans la cour où les cieux bas plaquaient d’ors vermeils
Les vitres ; les pavés puant l’eau de lessive
Souffraient l’ombre des toits bordés de noirs sommeils.

VI

Qui dira ces langueurs et ces pitiés immondes
Et ce qu’il lui viendra de haine, ô sales fous,
Dont le travail divin déforme encore les mondes
Quand la lèpre, à la fin, rongera ce corps doux,

Et quand, ayant rentré tous ces nœuds d’hystéries
Elle verra, sous les tristesses du bonheur,
L’amant rêver au blanc million des Maries
Au matin de la nuit d’amour, avec douleur !

VII

Sais-tu que je t’ai fait mourir ? J’ai pris ta bouche,
Ton cœur, tout ce qu’on a, tout ce que vous avez,
Et moi je suis malade. Oh ! je veux qu’on me couche
Parmi les Morts des eaux nocturnes abreuvés !

J’étais bien jeune, et Christ a souillé mes haleines,
Il me bonda jusqu’à la gorge de dégoûts ;
Tu baisais mes cheveux profonds comme les laines,
Et je me laissais faire !… Oh ! va… c’est bon pour vous,

Hommes ! qui songez peu que la plus amoureuse
Est, dans sa conscience, aux ignobles terreurs
La plus prostituée et la plus douloureuse
Et que tous nos élans vers vous sont des erreurs.

Car ma communion première est bien passée !
Tes baisers, je ne puis jamais les avoir bus.
Et mon cœur et ma chair par ta chair embrassée
Fourmillent du baiser putride de Jésus…

VIII

Alors l’âme pourrie et l’âme désolée
Sentiront ruisseler tes malédictions.
— Ils avaient couché sur ta haine inviolée,
Échappés, pour la mort, des justes passions.

Christ, ô Christ, éternel voleur des énergies,
Dieu qui, pour deux mille ans, vouas, à ta pâleur,
Cloués au sol, de honte et de céphalalgies,
Ou renversés, les fronts des Femmes de douleur.

(A. Rimbaud, Poésies, 1871)



Notes

Séreux : qui produit un liquide analogue à la lymphe.
Congrégé : Rassemblé.
Nitide : Resplendissant, brillant.
Illuné : Éclairé, baigné, empli par la lumière de la lune.
Bonder : Remplir autant qu’il est possible n'importe quel contenant.
Céphalalgie : Douleur de tête.
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Re: Poésies (mont)parnassiennes

Message par Montparnasse »

LES PAUVRES À L’ÉGLISE

Parqués entre des bancs de chêne, aux coins d’église
Qu’attiédit puamment leur souffle, tous leurs yeux
Vers le chœur ruisselant d’orrie et la maîtrise
Aux vingt gueules gueulant les cantiques pieux ;

Comme un parfum de pain humant l’odeur de cire,
Heureux, humiliés comme des chiens battus,
Les Pauvres au bon Dieu, le patron et le sire,
Tendent leurs oremus risibles et têtus.

Aux femmes, c’est bien bon de faire des bancs lisses,
Après les six jours noirs où Dieu les fait souffrir !
Elles bercent, tordus dans d’étranges pelisses,
Des espèces d’enfants qui pleurent à mourir :

Leurs seins crasseux dehors, ces mangeuses de soupe,
Une prière aux yeux et ne priant jamais,
Regardent parader mauvaisement un groupe
De gamines avec leurs chapeaux déformés.

Dehors, le froid, la faim, l’homme en ribote :
C’est bon. Encore une heure ; après, les maux sans noms !
— Cependant, alentour, geint, nasille, chuchote
Une collection de vieilles à fanons ;

Ces effarés y sont et ces épileptiques
Dont on se détournait hier aux carrefours ;
Et, fringalant du nez dans des missels antiques
Ces aveugles qu’un chien introduit dans les cours.

Et tous, bavant la foi mendiante et stupide,
Récitent la complainte infinie à Jésus
Qui rêve en haut, jauni par le vitrail livide,
Loin des maigres mauvais et des méchants pansus,

Loin des senteurs de viande et d’étoffes moisies,
Farce prostrée et sombre aux gestes repoussants ;
— Et l’oraison fleurit d’expressions choisies,
Et les mysticités prennent des tons pressants,

Quand, des nefs où périt le soleil, plis de soie
Banals, sourires verts, les Dames des quartiers
Distingués, — ô Jésus ! — les malades du foie
Font baiser leurs longs doigts jaunes aux bénitiers.

(A. Rimbaud, Poésies, 1871)


Notes

Orrie : Néologisme fondé sur « or ».
Oremus : Prière.
Ribote : Joyeux excès de table et de boisson.
Fanon : Repli de la peau qui pend sous le cou des boeufs et de certains animaux.
Fringaler : Néologisme fondé sur « fringale ». Ici, de lecture.
Oraison : Prière.
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Re: Poésies (mont)parnassiennes

Message par Montparnasse »

Je ne connaissais pas ce poème ou bien l'ai-je oublié ? Attention, ce n'est pas un monologue mais bien un dialogue (intérieur)...


CE QUI RETIENT NINA

LUI

Ta poitrine sur ma poitrine,
Hein ? nous irions,
Ayant de l’air plein la narine,
Aux frais rayons

Du bon matin bleu qui vous baigne
Du vin de jour ?…
Quand tout le bois frissonnant saigne
Muet d’amour

De chaque branche, gouttes vertes,
Des bourgeons clairs,
On sent dans les choses ouvertes
Frémir des chairs ;

Tu plongerais dans la luzerne
Ton long peignoir,
Divine avec ce bleu qui cerne
Ton grand œil noir,

Amoureuse de la campagne,
Semant partout,
Comme une mousse de champagne,
Ton rire fou !

Riant à moi, brutal d’ivresse,
Qui te prendrais
Comme cela, − la belle tresse,
Oh ! − qui boirais

Ton goût de framboise et de fraise,
Ô chair de fleur !
Riant au vent vif qui te baise
Comme un voleur !

Au rose églantier qui t’embête
Aimablement…
Riant surtout, ô folle tête,
À ton amant !…

Dix-sept ans ! Tu seras heureuse !
Oh ! les grands prés,
La grande campagne amoureuse !
— Dis, viens plus près !…

— Ta poitrine sur ma poitrine,
Mêlant nos voix,
Lents, nous gagnerions la ravine,
Puis les grands bois !…

Puis, comme une petite morte,
Le cœur pâmé,
Tu me dirais que je te porte,
L’œil mi-fermé…

Je te porterais, palpitante,
Dans le sentier…
L’oiseau filerait son andante,
Joli portier…

Je te parlerais dans ta bouche :
J’irais, pressant
Ton corps, comme une enfant qu’on couche,
Ivre du sang

Qui coule, bleu, sous ta peau blanche
Aux tons rosés,
Te parlant bas la langue franche…
Tiens !… — que tu sais…

Nos grands bois sentiraient la sève,
Et le soleil
Sablerait d’or fin leur grand rêve
Sombre et vermeil !

Le soir ?… Nous reprendrons la route
Blanche qui court,
Flânant, comme un troupeau qui broute,
Tout à l’entour…

Les bons vergers à l’herbe bleue
Aux pommiers tors !
Comme on les sent tout une lieue,
Leurs parfums forts !

Nous regagnerions le village
Au ciel mi-noir ;
Et ça sentirait le laitage
Dans l’air du soir ;

Ça sentirait l’étable pleine
De fumiers chauds,
Pleine d’un rythme lent d’haleine,
Et de grands dos

Blanchissant sous quelque lumière ;
Et, tout là-bas,
Une vache fienterait fière,
À chaque pas !…

— Les lunettes de la grand’mère
Et son nez long
Dans son missel, le pot de bière
Cerclé de plomb,

Moussant entre les larges pipes
Qui, crânement,
Fument : dix, quinze, immenses lippes
Qui, tout fumant,

Happent le jambon aux fourchettes
Tant, tant et plus ;
Le feu qui claire les couchettes,
Et les bahuts ;

Les fesses luisantes et grasses
D’un gros enfant
Qui fourre, à genoux, dans des tasses,
Son museau blanc

Frolé par un mufle qui gronde
D’un ton gentil,
Et pourlèche la face ronde
Du cher petit…

Noire, rogue au bord de sa chaise,
Affreux profil,
Une vieille devant la braise
Qui fait du fil ;

Que de choses nous verrions, chère,
Dans ces taudis,
Quand la flamme illumine, claire,
Les carreaux gris !…

— Et puis, fraîche et toute nichée
Dans les lilas,
La maison, la vitre cachée
Qui rit là-bas…

Tu viendras, tu viendras, je t’aime,
Ce sera beau !
Tu viendras, n’est-ce pas ? et même…

ELLE

Mais le bureau ?

(A. Rimbaud, Poésies, 1870)


Notes

Rogue : Qui est plein de morgue, à la fois méprisant, froid et rude.
Tors : Tordu
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Re: Poésies (mont)parnassiennes

Message par Liza »

Orémus, je ne connaissais pas. Remarque je ne crois en rien, malgré cela, je suis baptisée. Pensez dans un couvent, même ancien !

« Une vache fienterait fière. » Fienterait m’a surprise, je pensais ce verbe attaché aux oiseaux. J’ai vérifié, il concerne certains animaux. La vache en fait sans doute partie.

Les anciens auteurs sont bien charmants. Merci Montparnasse.
On ne me donne jamais rien, même pas mon âge !
 
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Re: Poésies (mont)parnassiennes

Message par Montparnasse »

Rimbaud prend souvent certaines libertés avec la langue (de son époque). N'oublions pas qu'il n'a que 16 ans, l'âge de la révolte et du désir de liberté (l'imagination en faisant partie).

Oremus ou Orémus vient du latin (« Prions ! »). C'est en premier lieu un appel à la prière, c'est le terme consacré qui est prononcé par le prêtre pendant l'office. Dans un sens plus moderne, c'est la prière elle-même mais ce n'est plus le sens de la langue latine.

Mes parents ont deux religions différentes. Mon père ayant fait défaut (était-il croyant ?), j'ai été élevé par ma mère, athée. Comme la vie est faite de contradictions, j'ai suivi un simulacre d'initiation religieuse pour faire plaisir à ma famille. « Le Mécréant » non publié sur les forums résume ma pensée en matière de religion. Il ne me reste que la foi en l'art, en l'homme, c'est-à-dire en une petit nombre d'entre eux.
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Re: Poésies (mont)parnassiennes

Message par Montparnasse »

Une variante du premier poème du « Cahier de Douai » initialement intitulé : « Première soirée ».


COMÉDIE EN TROIS BAISERS

Elle était fort déshabillée,
Et de grands arbres indiscrets
Aux vitres penchaient leur feuillée
Malinement, tout près, tout près.

Assise sur ma grande chaise,
Mi-nue, elle joignait les mains.
Sur le plancher frissonnaient d’aise
Ses petits pieds si fins, si fins.

— Je regardai, couleur de cire
Un petit rayon buissonnier
Papillonner, comme un sourire
Sur son beau sein, mouche au rosier.

— Je baisai ses fines chevilles.
Elle eut un long rire tris-mal
Qui s’égrenait en claires trilles,
Une risure de cristal…

Les petits pieds sous la chemise
Se sauvèrent : « Veux-tu finir ! »
— La première audace permise,
Le rire feignait de punir !

— Pauvrets palpitants sous ma lèvre,
Je baisai doucement ses yeux :
— Elle jeta sa tête mièvre
En arrière : « Oh c’est encor mieux !… »

« Monsieur, j’ai deux mots à te dire… »
— Je lui jetai le reste au sein
Dans un baiser, qui la fit rire
D’un bon rire qui voulait bien…

— Elle était fort déshabillée
Et de grands arbres indiscrets
Aux vitres penchaient leur feuillée
Malinement, tout près, tout près.

(A. Rimbaud, Poésies)


Notes

Malinement : Malignement ?
Tris-mal : Qui est très aigu, qui a la caractéristique d’un grincement de dent, d’un trisme.
Risure : Onde.
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Re: Poésies (mont)parnassiennes

Message par Montparnasse »

Je croyais l'avoir mis, mais non, je ne le trouve pas. Deuxième poème du « Cahier de Douai ».


SENSATION

Par les soirs bleus d’été, j’irai dans les sentiers,
Picoté par les blés, fouler l’herbe menue :
Rêveur, j’en sentirai la fraîcheur à mes pieds.
Je laisserai le vent baigner ma tête nue !

Je ne parlerai pas, je ne penserai rien :
Mais l’amour infini me montera dans l’âme,
Et j’irai loin, bien loin, comme un bohémien
Par la Nature, — heureux comme avec une femme.

(A. Rimbaud, Poésies, 1870)
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Re: Poésies (mont)parnassiennes

Message par Liza »

Je connais trisme qui est provoqué par le tétanos, est-ce la même signification ?
Lou doit mettre de l'ordre dans mon dico, il n'y arrive pas.
On ne me donne jamais rien, même pas mon âge !
 
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Re: Poésies (mont)parnassiennes

Message par Montparnasse »

Oui, c'est le bruit du grincement de dent qui est provoqué par la contraction des mâchoires. Encore une invention de l'auteur. Pas sûr qu'elle soit encore utilisée.
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