BELOVED livre et film

Dessin, peinture, sculpture, photographie, cinéma, BD, etc.
Règles du forum
Utiliser un lien vers un hébergeur de photos / vidéos plutôt qu'un transfert de fichiers vers le forum (l'espace est limité). Merci !

Ex : http://www.casimages.com/ https://www.youtube.com/
Avatar de l’utilisateur
Dona
Grand condor
Messages : 1893
Inscription : 04 janvier 2016, 21:45

BELOVED livre et film

Message par Dona »

Je suis en train de relire "Beloved" de Toni Morisson et comme je m'apprête à revoir le film, voici que j'ai envie d'en dire.
Ce livre et son adaptation ne sont pas des plus récents mais je leur trouverai toujours une atmosphère particulièrement pesante. Ils diffusent un effroi très particulier.


"Beloved"

Roman écrit par Toni Morrisson, traduit de l'anglais en 1989, a raflé le Pulitzer l'année d'avant en 88.

Epoque: avant l'abolition de l'esclavage en 1848.

Lieu : aux environs de Cincinnati dans l'Ohio.

Thème : Sethe, esclave en fuite, égorge son bébé pour lui éviter le sort d'esclave.

Depuis ce jour funeste, la maison de Sethe est hantée par l'âme vengeresse de sa petite fille. Les fils fuient la maison bouleversée par les manifestations surnaturelles incessantes. Seule la seconde fille demeure auprès de Sethe, la mère.
18 ans après le meurtre, Beloved, le bébé assassiné, ressurgit, morte-vivante mais de chair et d'os cette fois et détruit, progressivement, la vie de sa mère et de sa soeur.

L'infanticide, l'impossible nécessité d'exorciser le passé, la souffrance d'être une mère assassine, le thème de l'expiation donnent au roman une dimension qui dépasse largement celle du genre fantastique. C'est un univers très étrange que celui de Beloved dans la mesure où le spectateur adhère totalement à ce qu'on lui montre et qu'on ne lui donne aucun autre procédé (puisque l'histoire est racontée du point de vue de la mère) pour imaginer que l'apparition du spectre n'est qu'illusion.

Tout au contraire, l'effet de réalisme est renforcé par le fait que le fantôme du bébé est vu par des témoins extérieurs à la famille. Rationnellement on pourrait imaginer que Beloved réincarnée n'est autre que la vision psychotique d'une mère torturée par l'infanticide, si légitime a-t-il pu être. Toutefois, le roman comme son adaptation cinématographique ne proposent aucune équivoque : cette apparition est "vivante" . Est privilégiée alors la croyance d'un monde d'outre-tombe.


Le film de Jonathan Demme reproduit, sans trop d'écart, l'angoisse diffuse qui parcourt tout le roman. Le malaise général vient du décalage de l'étrange réalité que l'on donne à voir à l'occidental : là où tout paraîtrait incroyable et effroyable dans un scénario américain à gros budget, on perçoit ici une atmosphère délétère plus pénétrante et plus morbide : une surréalité basée sur l'animisme africain où l'intrusion de la mort est matériellement manifeste et tacitement reconnue dans la vie réelle.

C'est ce décalage entre le sentiment de peur ( très souvent lié au genre fantastique) et la culture ancestrale africaine, qui me semble intéressant dans l'oeuvre littéraire et cinématographique.



Image
Répondre