Seize ans

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Liza
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Seize ans

Message par Liza »

Afin de le faire remonter en cadeau, j’ai cherché un texte que j’ai écrit… il y a deux ans. Impossible de le trouver ! Trop ancien, je ne l’ai pas déposé ici. Je souhaitais l’aligner sur mon âge avéré aujourd'hui, finalement je l’ai laissé comme il était.
Pour le moment, je compte mes années entières, comme les pizzas, en quatre saisons. Dans quelques décennies j’avouerai trente printemps en ayant quarante étés et autant d’automnes et d’hivers.

Seize ans

C’est inattendu ! Mes profs m’ont suppliée de faire un discours ! Hier, ils imploraient mon silence. Faut-il attendre seize ans pour acquérir le droit à la parole ? Seize ans ! Je souhaite oublier ma jeunesse au porte-manteau le plus rapidement possible. La fierté n’empêchant pas de vieillir, une fois adulte, paradoxalement, j’userai certainement mes forces à tenter de la retenir ?

Ma naissance est un miracle, je suis née sans parent, je ne suis la fille de personne. Je ne suis pas le fruit d’un tour de passe-passe abracadabrantesque, je vous rassure. C’est indéniable, quelqu’un a semé une graine, mais personne n’a songé à la récolter. Je me suis mise au monde toute seule, après une longue hésitation sur le moment opportun à ma naissance. Suis-je un phénomène inexplicable ? Je ne crois pas, toutefois la rigueur et la prudence justifient le jour choisi pour ma venue au monde.

Le premier de l’An est un jour d’embrassades et de réjouissances, donc, il n’a pas vu ma naissance. L’Épiphanie non plus, fille toute simple, je n’ai nul besoin de couronne. Tintin pour la Saint-Valentin, tout le monde le sait, je n’aime que moi et, je m’aime tous les jours plus que la veille. Je ne suis pas née en Carême, j’ai toujours faim, je mange comme quatre sans prendre un gramme ! Je ne suis jamais allée à Rome, entre nous, Pâques est un envol réservé aux cloches. Le Premier mai, il faut être salarié pour faire la grève et manifester son mécontentement en quémandant une rallonge de rétribution contre une réduction d’horaire. Quant au huit mai, je ne suis pas héroïne de guerre. Même si j’ai bataillé avec une armée de gamins, je n’ai aucune Victoire à fêter.

Je n’ai eu l’occasion de monter à bord d’aucun bateau donc, je n’ai jamais débarqué nulle part, même en juin. J’habite dans une plaine où poussent betteraves sucrières et maïs, la Pentecôte, c’est fichu ! Le quatorze juillet, aucune envie de sortir me faire piétiner les orteils au bal des pompiers, il y a du bruit et les pétards me font peur. À la mi-août, bof, je n’aime pas les chats, ils se glissent partout, sautent sur moi par surprise pour me couvrir de poils perdus. Septembre, naître pour la rentrée des classes, ah non alors, j’aime trop les vacances ! Octobre, le mois des Pélagie, Narcisse, Bienvenue et autres Léger ou Crépin, ma fierté serait outragée, ce ne sont pas des prénoms convenant à notre époque et à ma personnalité !

En voici enfin un qui me convient tout à fait : Halloween ! Parfait pour une gamine rouge et ridée à laquelle il ne manquait qu’une bougie pour illuminer le regard. C’était beaucoup trop tôt, je n’étais encore que la moitié de moi-même ! Novembre, la froidure, le vent, les grandes marées, brrrr ! Un mois humide et lugubre que l’on ne peut éviter pour finir le calendrier. La Toussaint et le jour des Morts, pas terrible pour naître. Le onze encore, pour signer l’Armistice entre ma mère, qui devait en avoir assez de me porter, et moi qui trouvais le temps long dans son ventre devenant un trop petit logement. Naître en décembre, le mois de Noël, je n’ai rien d’un cadeau. La surprise serait mal venue. Vous me voyez, toute froissée, enveloppée d’un joli papier multicolore couvert de petits sapins, la taille entourée d’une ficelle ombilicale, joliment nouée ?

Un heureux concours de circonstances m’a libérée de ma mère en février, précisément le quinze, jour de la Saint-Claude. Bizarrerie du hasard ? N’y croyez pas ! N’est-ce pas à Saint-Claude que l’on fabrique ces morceaux de bois qu’une fois bourrés de tabac, d’aucuns tètent comme une cigarette ? Les pipes sont bien meilleures quand elles sont méticuleusement culottées, paraît-il ! Non, ce n’est pas une blague…, je sais, je ne manque pas de culot ! Comment appelle-t-on une pipe au berceau ? Faute d’hériter du nom du saint parfaitement asexué, on m’a affublé du diminutif « Pipelette ». Un artifice dominant de mon caractère impossible à nier ! Une page uniquement pour donner mon jour de naissance et, encore, vous n’avez pas l’année. Je ne suis même pas une nouveauté de l’an 2000, je suis une vieille fille, née au siècle dernier !

J’ai vu le jour… non, j’ai définitivement abandonné ma génitrice, en… et puis débrouillez-vous ! J’ai seize ans, l’âge de l’ignorance et de la bêtise aux dires de tous ! Alors calculez vous-même ! Passer tout ce temps à me laisser cocooner par des gens étrangers à ma parentèle, je n’en tire aucun mérite. C’est inéluctable, tout le monde a eu, a ou aura seize ans.

Liza
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Montparnasse
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Re: Seize ans

Message par Montparnasse »

Je le connaissais d'AVP, j'aime beaucoup. Il faut que je te le colle dans l'index, c'est le n°82 de Spleen.

Il y a une coquille ici : « Passer tout ce temps à me laisser cocooner par [dans] gens étrangers à ma parentèle, ». Je vais mettre « des ».
Quand les Shadoks sont tombés sur Terre, ils se sont cassés. C'est pour cette raison qu'ils ont commencé à pondre des œufs.
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Liza
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Re: Seize ans

Message par Liza »

Merci pour tout, les compliments et les corrections, je manque d'attention.
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romithefox
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Re: Seize ans

Message par romithefox »

Je n'avais jamais lu ce texte, tu l'avais écrit à seize ans ? Eh beh ! Quelle maturité déjà... Joli cadeau que tu nous offres pour tes dix-huit ans !
tout le monde le sait, je n’aime que moi et, je m’aime tous les jours plus que la veille
Sacrée Liza (rires) !Bravo miss !
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