AMNESIQUE.
Publié : 10 juillet 2017, 18:28
-------AMNESIQUE.
Il ouvrit les yeux sous le ciel pale de ce qui lui parut être une chambre d' hôpital. Il fit virer de gauche à droite son regard, essaya un mouvement de la tête... celle-ci prise qu'elle était dans un carcan de maintien, refusa tous mouvements... Il voyait son pied, sa jambe logés dans un berceau tenu en l'air par un câble... Il bougea son bras gauche qui, bien que douloureux, accepta l'ordre reçu. D'une main malhabile, il entreprit de tâter son corps : Sa tête, ses épaules étaient immobilisées, son bras droit entièrement plâtré, son thorax s'effaçait sous d'épais bandages. Sa jambe droite, il la voyait, pendue dans une gouttière... quand à l'autre... il ne la sentait pas !
Par moment sa vue se brouillait, il sentait son être se dissoudre dans de la ouate... Il essaya d'ouvrir la bouche mais ne put que faire grincer ses dents... Il avait soif... Il avait froid, ou chaud, il ne savait pas !
Quand un visage souriant se pencha sur lui, il eut peur. Où était-il ? Comment était-il arrivé là ? Que s'était-il passé ? Que de questions qui lui demeuraient sans réponse... L'infirmière lui parla :
« Ah ! Vous voilà enfin réveillé, vous avez dormi longtemps... Comment vous sentez vous ?
Curieusement, il réussit à articuler quelques mots à peines audibles.
- Depuis... combien de … temps... suis-je...là ?
- Ça fera dix jours demain, monsieur... monsieur vous m'écoutez ? Comment vous appelez-vous ?
Monsieur vous m'entendez ? Comment vous appelez- vous ?
C'était une bonne question, comment s'appelait-il ? Il fouillait dans sa mémoire mais n'y trouvait rien.
-Monsieur, pouvez-vous me dire votre nom ?
- Elle en a de bonne celle-là ! Songea-t-il, mon nom, mon nom, il faudrait que je me souvienne...
Il cherchait dans sa tête, rien, il n'y avait rien... Un trou vide de tout souvenir, comme un livre blanc ouvert sur un puits sans fond, sans âme, sans vie.
- Ne cherchez pas trop, ne vous fatiguez pas, cela arrive parfois lors de chocs trop violents... Puis,
petit à petit, la mémoire reprend sa place et vous retrouvez votre passé, les gens que vous connaissez, tout un film défile devant vous dont les images d'abord mélangées se remettent en bonne place... Et la vie reprend son cours.
Il aurait voulu sourire, Mais sa bouche lui faisait mal, il ne réussit qu'un rictus ressemblant à une grimace. Il réclama dans un souffle : « à boire »
- A boire, certainement pas monsieur, tout ce qu'il faut pour vous nourrir et vous abreuver passe par ces deux perfusions... Votre œsophage, votre estomac ne supporteraient pas, pour le moment, la moindre intrusion... Ce que je vais faire pour vous rafraîchir, mouiller une serviette et la passer sur votre visage... C'est là tout ce que je peux.
- Il est réveillé ? Une voix d'homme, était-ce un médecin ?
- Alors, comment se sent notre miraculé ?.. Ne dites rien, pouvez-vous cligner les yeux ? Une fois pour oui, deux fois pour non... vous avez compris ? ( un clin d'oeil)
- Parfait, vous souvenez-vous ce qui vous est arrivé ? ( deux battements)
- De votre nom ?.. non ?
- Depuis combien de temps êtes-vous ici ?.. oui
L'infirmière intervint : - Je le lui ai dit tout à l'heure, ça fera dix jours demain.
- Bon d'accord, mais ne lui donnez pas trop de repaires, il est important qu'il les retrouve seul... Vous avez mal ?.. Oui.
- Où ?..
Il montra ses épaules, son thorax, sa tête.
- Vous avez la migraine ?... oui... Mademoiselle Lydia va vous donner de quoi calmer toutes ces douleurs... Reposez-vous, il faut attendre que votre corps se répare. Je reviendrai demain, si vous le pouvez, nous essaieront de parler un peu... Just'un peu, pour éviter de faire ressurgir vos douleurs... Mademoiselle, n'omettez pas de rafraîchir son visage avec des tampons humides.
- Bien monsieur.
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Il était de nouveau seul dans la chambre, la piqûre avait calmé rapidement les douleurs naissantes. Parfois, il sombrait dans la somnolence, parfois, au contraire il était lucide. Il projetait sa vue sur le mur de sa vie... il n'aurait jamais cru que ce fut possible : vivre dans le vide, sans passé, sans doute aussi sans avenir... dans une pénombre ténébreuse.... Il voyait, bien sur il voyait : mais quoi ?..Rien, un vide immense, sans joie, sans tristesse, sans tous ces petits rien qui font que la vie est une vie... Allaient-elles revenir les images du film ?.. Avait-il une femme ? A son doigt, il voyait la marque d'une bague... Etait-il séparé, veuf, divorcé ?... Quoi d'autre, avait-il un métier, des amis, des enfants ? Quels pouvaient-ils être ?.. Il réussit enfin à fermer les yeux sur son vide et à oublier momentanément.
La journée s'étira entre ses rêves sans décors, la voix et le sourire de la jolie infirmière qui régulièrement passait lui rafraîchir le visage, parer à tous les soins et vérifier, si l'on peut dire, que tout allait bien... Elle lui parlait avec les lèvres, il répondait avec les yeux... Elle sentait de l'anxiété en lui, quelle question lui taraudait l'esprit, qu'il ne pouvait poser ?
------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Il avait dormi d'un sommeil lourd, sans doute réparateur, longtemps les dames des services étaient passées surveiller... mais non, il n'y avait rien de grave, il dormait... Le médecin revint dans la matinée, il évalua l'état du patient ? nul doute, le corps reprenait le dessus, les couleurs, petit à petit, redoraient la face cadavérique... Les yeux aussi étaient moins cernés, moins creux dans leur orbite :
- C'est bon signe, pensa-t-il, inconsciemment, il a envie de vivre.
- Bonjour, comment vous sentez-vous ce matin ?.. Croyez-vous pouvoir me répondre doucement ?
Un son un peu rauque sortit des lèvres, mais il était affirmatif.
-Des douleurs ?... encore bien sur, fort ?
-Moins qu'hier.
- Des nausées, des troubles de la vue ?
- Ca va.
-Regardez mon crayon... essayez de le suivre.
Il fit avancer, reculer, virer de gauche à droite son stylo bille. Puis, il décrivit des cercles, d'abord petits, puis plus grands avant d'immobiliser sa main à un mètre environ du visage... et brusquement, de venir presque le toucher... Les yeux du patient jouaient avec le stylo en accord parfait.
- Bien... très bien, des images vous sont-elles revenues ?
- Non, rien.
- Ce n'est pas grave, votre subconscient est encore sous le choc, laissez le se reposer... Bon, assez pour aujourd'hui il ne faut pas trop vous fatiguer... Nous reprendrons demain.
- Docteur
- Oui ?
- Qu'est-il arrivé à ma jambe ?
- Elle était cassée à plusieurs endroits, mais rien d'irréparable rassurez-vous.
- Pas celle-ci, il désignait la jambe retenue dans la gouttière, l'autre ?... Je veux savoir... Elle n'existe plus, je ne sens rien ?
- Elle était irréparable, mais ce n'est rien, de nos jours avec les prothèses qui se fabriquent, vous pourrez bientôt marcher, courir, sans qu'il n'y paraisse... Reposez-vous à présent, dans votre cas, le repos est le meilleur des remèdes.
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Passèrent ainsi des semaines pendant lesquelles l'état du patient s'améliora lentement. Les douleurs disparaissaient, le visage retrouvait une réalité... Par petits bons, avec beaucoup de soins, la carcasse se remettait de son calvaire... La jambe se ressoudait bien. Il ne fallait pas, bien sur parler de sortie... ce serait long, très long... Des journées encore, voire des semaines à ne suivre des yeux que le plafond de la pièce et, accessoirement, les courbes avantageuses des infirmières.
Un matin, par un beau soleil, on poussa son lit sur une terrasse... Même sa jambe amputée, il avait fini par l'admettre... Ce qui le minait pourtant, était cette absence de vie... Les médecins avaient beau dire que cela reviendrait avec le temps, il arrivait à ne plus y croire... Il se creusait la tête, cherchait un fil, aussi ténu soit-il, mais il ne trouvait rien... rien que cet atroce vide ! Il menait désormais, une vie invisible.
-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Après maints examens, nombres de radios et scanners, on avait libéré ses épaules du carcan protecteur. N'osant d'abord pas bouger la tête, il restait là, immobile comme une pierre... Enfin, il tourna la tête à gauche doucement, puis à droite... Il haussa légèrement les épaules , remua son bras valide... Il se sentait libre, pourquoi ? Pour qui ?
Le médecin lui annonça qu'avant la fin de la semaine présente, on lui ôterait le plâtre du bras... Pour la jambe, il faudrait encore attendre. Il pouvait désormais se redresser sur son lit, la télé, la lecture, vinrent boucher les heures creuses. Il n'avait aucune visite, personne ne le réclamait, il était un parfait inconnu, un inexistant. Peut-être, quelque part, une femme et des enfants pleuraient le retour d'un être... mais où ?... Il s'habituait à n'être qu'une image, image sans contour, sans famille, sans amis, sans travail.
Les photos qu'avaient relayées les journaux et la télé, n'avaient éveillé la curiosité de personne... Il
n'existait pas... On l'appelait par le numéro de sa chambre qui trônait en un petit carré rouge sur la porte « douze »
Parfois cette situation faisait bouillir sa tête, alors éclatait une migraine folle... Il se jetait sur la sonnette et réclamait un calmant. Reposé, toutes douleurs alanguies, il retrouvait son univers verdâtre dont ses yeux, depuis longtemps, avaient visité tous les coins... Une nuit de repos paisible, il fit un étrange rêve, pour la première fois depuis longtemps, des images émerveillèrent ses yeux clos...
----- A SUIVRE
Il ouvrit les yeux sous le ciel pale de ce qui lui parut être une chambre d' hôpital. Il fit virer de gauche à droite son regard, essaya un mouvement de la tête... celle-ci prise qu'elle était dans un carcan de maintien, refusa tous mouvements... Il voyait son pied, sa jambe logés dans un berceau tenu en l'air par un câble... Il bougea son bras gauche qui, bien que douloureux, accepta l'ordre reçu. D'une main malhabile, il entreprit de tâter son corps : Sa tête, ses épaules étaient immobilisées, son bras droit entièrement plâtré, son thorax s'effaçait sous d'épais bandages. Sa jambe droite, il la voyait, pendue dans une gouttière... quand à l'autre... il ne la sentait pas !
Par moment sa vue se brouillait, il sentait son être se dissoudre dans de la ouate... Il essaya d'ouvrir la bouche mais ne put que faire grincer ses dents... Il avait soif... Il avait froid, ou chaud, il ne savait pas !
Quand un visage souriant se pencha sur lui, il eut peur. Où était-il ? Comment était-il arrivé là ? Que s'était-il passé ? Que de questions qui lui demeuraient sans réponse... L'infirmière lui parla :
« Ah ! Vous voilà enfin réveillé, vous avez dormi longtemps... Comment vous sentez vous ?
Curieusement, il réussit à articuler quelques mots à peines audibles.
- Depuis... combien de … temps... suis-je...là ?
- Ça fera dix jours demain, monsieur... monsieur vous m'écoutez ? Comment vous appelez-vous ?
Monsieur vous m'entendez ? Comment vous appelez- vous ?
C'était une bonne question, comment s'appelait-il ? Il fouillait dans sa mémoire mais n'y trouvait rien.
-Monsieur, pouvez-vous me dire votre nom ?
- Elle en a de bonne celle-là ! Songea-t-il, mon nom, mon nom, il faudrait que je me souvienne...
Il cherchait dans sa tête, rien, il n'y avait rien... Un trou vide de tout souvenir, comme un livre blanc ouvert sur un puits sans fond, sans âme, sans vie.
- Ne cherchez pas trop, ne vous fatiguez pas, cela arrive parfois lors de chocs trop violents... Puis,
petit à petit, la mémoire reprend sa place et vous retrouvez votre passé, les gens que vous connaissez, tout un film défile devant vous dont les images d'abord mélangées se remettent en bonne place... Et la vie reprend son cours.
Il aurait voulu sourire, Mais sa bouche lui faisait mal, il ne réussit qu'un rictus ressemblant à une grimace. Il réclama dans un souffle : « à boire »
- A boire, certainement pas monsieur, tout ce qu'il faut pour vous nourrir et vous abreuver passe par ces deux perfusions... Votre œsophage, votre estomac ne supporteraient pas, pour le moment, la moindre intrusion... Ce que je vais faire pour vous rafraîchir, mouiller une serviette et la passer sur votre visage... C'est là tout ce que je peux.
- Il est réveillé ? Une voix d'homme, était-ce un médecin ?
- Alors, comment se sent notre miraculé ?.. Ne dites rien, pouvez-vous cligner les yeux ? Une fois pour oui, deux fois pour non... vous avez compris ? ( un clin d'oeil)
- Parfait, vous souvenez-vous ce qui vous est arrivé ? ( deux battements)
- De votre nom ?.. non ?
- Depuis combien de temps êtes-vous ici ?.. oui
L'infirmière intervint : - Je le lui ai dit tout à l'heure, ça fera dix jours demain.
- Bon d'accord, mais ne lui donnez pas trop de repaires, il est important qu'il les retrouve seul... Vous avez mal ?.. Oui.
- Où ?..
Il montra ses épaules, son thorax, sa tête.
- Vous avez la migraine ?... oui... Mademoiselle Lydia va vous donner de quoi calmer toutes ces douleurs... Reposez-vous, il faut attendre que votre corps se répare. Je reviendrai demain, si vous le pouvez, nous essaieront de parler un peu... Just'un peu, pour éviter de faire ressurgir vos douleurs... Mademoiselle, n'omettez pas de rafraîchir son visage avec des tampons humides.
- Bien monsieur.
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Il était de nouveau seul dans la chambre, la piqûre avait calmé rapidement les douleurs naissantes. Parfois, il sombrait dans la somnolence, parfois, au contraire il était lucide. Il projetait sa vue sur le mur de sa vie... il n'aurait jamais cru que ce fut possible : vivre dans le vide, sans passé, sans doute aussi sans avenir... dans une pénombre ténébreuse.... Il voyait, bien sur il voyait : mais quoi ?..Rien, un vide immense, sans joie, sans tristesse, sans tous ces petits rien qui font que la vie est une vie... Allaient-elles revenir les images du film ?.. Avait-il une femme ? A son doigt, il voyait la marque d'une bague... Etait-il séparé, veuf, divorcé ?... Quoi d'autre, avait-il un métier, des amis, des enfants ? Quels pouvaient-ils être ?.. Il réussit enfin à fermer les yeux sur son vide et à oublier momentanément.
La journée s'étira entre ses rêves sans décors, la voix et le sourire de la jolie infirmière qui régulièrement passait lui rafraîchir le visage, parer à tous les soins et vérifier, si l'on peut dire, que tout allait bien... Elle lui parlait avec les lèvres, il répondait avec les yeux... Elle sentait de l'anxiété en lui, quelle question lui taraudait l'esprit, qu'il ne pouvait poser ?
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Il avait dormi d'un sommeil lourd, sans doute réparateur, longtemps les dames des services étaient passées surveiller... mais non, il n'y avait rien de grave, il dormait... Le médecin revint dans la matinée, il évalua l'état du patient ? nul doute, le corps reprenait le dessus, les couleurs, petit à petit, redoraient la face cadavérique... Les yeux aussi étaient moins cernés, moins creux dans leur orbite :
- C'est bon signe, pensa-t-il, inconsciemment, il a envie de vivre.
- Bonjour, comment vous sentez-vous ce matin ?.. Croyez-vous pouvoir me répondre doucement ?
Un son un peu rauque sortit des lèvres, mais il était affirmatif.
-Des douleurs ?... encore bien sur, fort ?
-Moins qu'hier.
- Des nausées, des troubles de la vue ?
- Ca va.
-Regardez mon crayon... essayez de le suivre.
Il fit avancer, reculer, virer de gauche à droite son stylo bille. Puis, il décrivit des cercles, d'abord petits, puis plus grands avant d'immobiliser sa main à un mètre environ du visage... et brusquement, de venir presque le toucher... Les yeux du patient jouaient avec le stylo en accord parfait.
- Bien... très bien, des images vous sont-elles revenues ?
- Non, rien.
- Ce n'est pas grave, votre subconscient est encore sous le choc, laissez le se reposer... Bon, assez pour aujourd'hui il ne faut pas trop vous fatiguer... Nous reprendrons demain.
- Docteur
- Oui ?
- Qu'est-il arrivé à ma jambe ?
- Elle était cassée à plusieurs endroits, mais rien d'irréparable rassurez-vous.
- Pas celle-ci, il désignait la jambe retenue dans la gouttière, l'autre ?... Je veux savoir... Elle n'existe plus, je ne sens rien ?
- Elle était irréparable, mais ce n'est rien, de nos jours avec les prothèses qui se fabriquent, vous pourrez bientôt marcher, courir, sans qu'il n'y paraisse... Reposez-vous à présent, dans votre cas, le repos est le meilleur des remèdes.
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Passèrent ainsi des semaines pendant lesquelles l'état du patient s'améliora lentement. Les douleurs disparaissaient, le visage retrouvait une réalité... Par petits bons, avec beaucoup de soins, la carcasse se remettait de son calvaire... La jambe se ressoudait bien. Il ne fallait pas, bien sur parler de sortie... ce serait long, très long... Des journées encore, voire des semaines à ne suivre des yeux que le plafond de la pièce et, accessoirement, les courbes avantageuses des infirmières.
Un matin, par un beau soleil, on poussa son lit sur une terrasse... Même sa jambe amputée, il avait fini par l'admettre... Ce qui le minait pourtant, était cette absence de vie... Les médecins avaient beau dire que cela reviendrait avec le temps, il arrivait à ne plus y croire... Il se creusait la tête, cherchait un fil, aussi ténu soit-il, mais il ne trouvait rien... rien que cet atroce vide ! Il menait désormais, une vie invisible.
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Après maints examens, nombres de radios et scanners, on avait libéré ses épaules du carcan protecteur. N'osant d'abord pas bouger la tête, il restait là, immobile comme une pierre... Enfin, il tourna la tête à gauche doucement, puis à droite... Il haussa légèrement les épaules , remua son bras valide... Il se sentait libre, pourquoi ? Pour qui ?
Le médecin lui annonça qu'avant la fin de la semaine présente, on lui ôterait le plâtre du bras... Pour la jambe, il faudrait encore attendre. Il pouvait désormais se redresser sur son lit, la télé, la lecture, vinrent boucher les heures creuses. Il n'avait aucune visite, personne ne le réclamait, il était un parfait inconnu, un inexistant. Peut-être, quelque part, une femme et des enfants pleuraient le retour d'un être... mais où ?... Il s'habituait à n'être qu'une image, image sans contour, sans famille, sans amis, sans travail.
Les photos qu'avaient relayées les journaux et la télé, n'avaient éveillé la curiosité de personne... Il
n'existait pas... On l'appelait par le numéro de sa chambre qui trônait en un petit carré rouge sur la porte « douze »
Parfois cette situation faisait bouillir sa tête, alors éclatait une migraine folle... Il se jetait sur la sonnette et réclamait un calmant. Reposé, toutes douleurs alanguies, il retrouvait son univers verdâtre dont ses yeux, depuis longtemps, avaient visité tous les coins... Une nuit de repos paisible, il fit un étrange rêve, pour la première fois depuis longtemps, des images émerveillèrent ses yeux clos...
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