Cœur à cœur

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Liza
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Cœur à cœur

Message par Liza »

Cœur à cœur

Le premier soleil du printemps inonde la véranda, au travers des carreaux transparents. Le thermomètre affiche trente-cinq degrés. Elle est allongée, en maillot de bain, sur son vieux lit devenu trop petit. Elle aime étendre son corps Lucie, offrir sa peau aux rayons, la sentir s’étrécir, s’alanguir. Sa chair, glisse lentement, vers un bien-être avancé, volé sur l’arrivée du printemps gagné. Bronzer ? Pensez-vous ! On ne bronze pas dans une véranda. Lucie s’offre une autre quête. Sa tête d’évaporée vit des moments exaltés. Elle aime s’étendre, entre les deux polochons servant d’accoudoirs. L’odeur de crin qui monte du matelas, c’est toute son enfance, tous ses souvenirs. Le support magique de ses rêves, devenu trop court, il est remisé là, en secours, parce qu’elle ne se résigne pas à se séparer de ses nuits d’enfance enchantée. Jamais l’esthétique moderne ou le confort de sa nouvelle couche ne lui apportera ce parfum de souvenir dans sa bouche.

Lucie pense à Léo, un garçon, habillé de façon recherchée, doit savoir, les filles déshabiller, pièce par pièce, avec une douceur, une tendresse inégalée. Un galant plein d’attentions, glissant doucement les mains dans mon cou, il enquête. Cette agréable investigation, d’un froissement léger, emporte ma liquette. Envolée de corps sage, où de doucereuses lèvres cherchent le délicat de ma peau et y trouvent l’intime de mon âme. Des chuchotements qui font s’exprimer mon corps. Brûlant ma peau, je veux des doigts fougueux, je veux trembler d’émoi. Être polie comme un joyau sous les mains de l’orfèvre. Des moments heureux, bien à moi.

Un doigt timide, dans mon dos, dessine un paysage à fleur de peau, comme un tatouage. La bouche frôle mon ventre, y exprimant les mots qu’il souhaite, sans attendre de réponse évidente. La chaleur inonde mon corps, je bous de cette moiteur intense que procure une joie immense. Corps à corps, je fonds dans des bras m’emportant, cœur à cœur, dans le feu extraordinaire d’un incendie volontaire.

Une jupe enroulée à la taille est fendue, c’est une ouverture pour ses mains fragiles. Mes jambes s’étirent sous les sollicitations malhabiles. Plus rien n'existe, plus aucun espace ne nous sépare. Effarouchée par tant de contradictoires pensées, j’aime cette plénitude, rompant net avec la réserve de mes habitudes. Le sentiment de garder cette chaleur pour un long temps, me remplit d’un besoin de certitude. Enrobée de murmures et de mots charmants, la jupe en portefeuille du genre cache secret, a cédé, glissant avec une douce légèreté, comme en automne, la chute aérienne, hésitante d’une feuille.

J’ai pris conscience de la situation, je suis serrée dans les bras doucereux d’un garçon. En bobettes, ce rempart est des plus sérieux. Un bastion de protection, bien illusoire, contre les tendres attaques montant à l’assaut des sentiments. Sur le lit, allongée dans les toiles, ma pudeur protégée, je n’attends que toi. Serrée contre une accueillante épaule, alanguie, j’oublie mes angoisses, prête à sortir de l’enfance. J’ai poussé le premier cri d’éveil de ma vie.

Entre les draps froissés, tire-bouchonnés par nos ébats maladroits, j’avoue, j’ai attendu trop longtemps avant de prendre le chemin des doigts câlins. J’arrache, sans un mot, le lien ténu qui me rattache à la pudeur indécente de l’adolescente. Je brave le feu de ma chair et le feu de l’enfer. Apaisée, assouvie, lovée je reste là, épuisée, assoiffée, pleine d’espérance, le cœur heureux d’un avenir somptueux.

— Lucie, habille-toi, je te ramène chez toi.
Je m’exécute, surprise de cette brutale demande rompant le charme d’un instant que je pensais interminable, prise d’un doute, dans la voiture, je questionne Léo :
— Tu reviendras demain, comme convenu ?
— Demain, je ne peux pas je regarde le match de foot avec Mat et ses trois copines. Je te redirai quand !

Je retombe sur terre en un instant, je mesure la dualité des garçons. Oubliant toute prudence, telle une furie je me jette sur le conducteur comme une harpie. Brutalement, c’est le trou noir, une chute, un accident. Je me démène, je rampe, horrifiée, cherchant à me repérer. La voiture doit être écrasée, je peux à peine bouger. On va venir nous aider. Un silence total règne autour de nous. Avec la scoumoune qui me colle aux basques, c’est certain, il n’y a pas un seul voisin ! Nous sommes sur une route de campagne déserte. Je cherche Léo, je tâte, je l’appelle. Je m’affole, j’ai peut-être tué Léo. Je crie de toutes mes forces afin de donner l’alerte.
— Au secours… au secours…
J’entends du bruit.Une main soulève les Airbags éclatés qui obstruent la lumière. Nous sommes sauvés !
— Lucie, inutile de hurler, que fais-tu sous ton vieux lit ? Si tu as trop chaud, entre à l’ombre dans la maison !

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Re: Cœur à cœur

Message par Montparnasse »

Juste une virgule en plus avant l'incise « habillé de façon recherchée » ? Peut-être un point-virgule ou deux points après Léo ? afin de simplifier la compréhension des phrases liziennes qui sont, parfois, fort compliquées. Une virgule après « pièce par pièce » ? Là, je suis moins sûr...

« Lucie pense à Léo ; / : un garçon, habillé de façon recherchée, doit savoir, les filles déshabiller, pièce par pièce avec une douceur, une tendresse inégalée. »
Quand les Shadoks sont tombés sur Terre, ils se sont cassés. C'est pour cette raison qu'ils ont commencé à pondre des œufs.
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Re: Cœur à cœur

Message par Liza »

Ce n’est pas mon genre préféré, toutefois ne devons-nous pas être capable d’écrire sur tout ?
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Re: Cœur à cœur

Message par Montparnasse »

Oui, tu as raison, surtout quand on est un jeune auteur (comme nous !). Je me suis aussi employé, avec plaisir et plus ou moins de succès, à écrire des choses très différentes. (clin d'œil)
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Re: Cœur à cœur

Message par Montparnasse »

Alors comme j'aime beaucoup, je te l'ai dit, je vais me concentrer sur les grains de sable pris dans les engrenages (smile).

L'inversion m'a gêné à la première lecture mais, si tu y tiens, pourquoi pas ?
Elle aime étendre son corps Lucie
Phrase lizienne par excellence mais rude, même pour le fan. Au niveau du sens, c'est quand même osé : « la chair qui glisse... ». Les inversions alourdissent ta phrase. Essaye de remettre tout ça d'aplomb avant de l'envoyer à Flammarion...
Sa chair, glisse lentement, vers un bien-être avancé, volé sur l’arrivée du printemps gagné.
Je ne te propose pas de correction parce que c'est too much pour mon modeste algorithme. Le lizien c'est comme le 110 m haies, on ne peut pas s'y lancer sans préparation.

Peut-être devrais-tu sacrifier quelques homéotéleutes pour gagner en légèreté. Ici, par exemple :
Jamais l’esthétique moderne ou le confort de sa nouvelle couche ne lui apportera ce parfum de souvenir dans sa bouche.

Il faut absolument que tu mettes un point après Léo, sinon c'est la noyade :
Lucie pense à Léo, un garçon, habillé de façon recherchée, doit savoir, les filles déshabiller, pièce par pièce, avec une douceur, une tendresse inégalée.
Sans cette virgule, la phrase est belle...


Je te propose : « Un galant plein d’attentions, glissant doucement les mains dans mon cou, qui enquête. » au lieu de :
Un galant plein d’attentions, glissant doucement les mains dans mon cou, il enquête.

Le jeu de mot est-il absolument nécessaire ici ?
Envolée de corps sage, où de doucereuses lèvres cherchent le délicat de ma peau
Il faut parfois savoir résister à ses pulsions... smile


J'aime beaucoup : « Des chuchotements qui font s’exprimer mon corps. » et plus loin : « Être polie comme un joyau sous les mains de l’orfèvre. », « Un doigt timide, dans mon dos, dessine un paysage à fleur de peau, comme un tatouage. »

Mais j'ai promis que je ne dirai rien si c'est bien.

je bous de cette moiteur intense que procure une joie immense.
Souviens-toi de ce que disait Boileau : « Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement - Et les mots pour le dire arrivent aisément. » Sans être trop indiscret, n'est-ce pas plutôt cette « moiteur intense » qui te « procure une joie immense » ? Pour moi, ce serait plus clair et surtout plus facile à exprimer. Trêve de taquineries.


L'« incendie volontaire » est bien trouvé.


Pas mal aussi : « Mes jambes s’étirent sous les sollicitations malhabiles. »


« Enrobée » me déplaît mais la suite me plaît :
Enrobée de murmures et de mots charmants, la jupe en portefeuille du genre cache secret, a cédé, glissant avec une douce légèreté, comme en automne, la chute aérienne, hésitante d’une feuille.
Que dirais-tu de : « Enveloppée de murmures et de mots charmants, la jupe en portefeuille du genre cache secret, a cédé, glissant avec une douce légèreté, comme en automne, la chute aérienne, hésitante d’une feuille. »

Une virgule ici : « lovée(,) je reste là ».

Pour la clarté et la chronologie, je dirais : « Brutalement, c’est l'accident, une chute, le trou noir. »


Bref, j'aime toujours autant, mais je ne peux m'empêcher d'y mettre les doigts.
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Re: Cœur à cœur

Message par Loustic »

Je suppose certaines inversions destinées à favoriser des terminaisons assonantes.
Elle a promis d'écrire son prochain texte « normal ».
Il n'avance pas m'a-t-elle dit ! M'étonne pas !
Sa normalité, n'est pas toujours la nôtre.
Le jour où nous trouvons un texte léger, sans aucun son, aucune fausse rime, aucun mot tordu, aucun jeu de mots et aucune allusion grivoise ou humoristique...

Ça correspondra au jour où Liza n'aura plus rien à dire, pas gagné !
Le nègre en littérature c'est un blanc qui travaille au noir pour un écrivain marron ! (Popeck)
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Re: Cœur à cœur

Message par Liza »

J'admets certaines lourdeurs.

Je promets, je vais subtiliser.
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Re: Cœur à cœur

Message par Dona »

Moi j'adore ce texte d'une sensualité débordante frisant l'érotisme adolescent ! :)

J'aime beaucoup ces notations charnelles. Il y a beaucoup de belles phrases. Je ne suis pas contre ces énumérations à rallonge avec le jeu d'homéotéleutes. Je trouve que tout cela évoque bien le fond : la jeune fille se laisse aller sans vraiment raisonner ses désirs... et ses phrases suivent le mouvement. :)

La chute, comme toujours chez Liza, est fracassante (et tellement vraie ! )

J'ai beaucoup apprécié ce passage notamment à l'image de certains autres, évocateurs mais tellement en contrepoint avec la fin du texte que tout ceci révèle de l'humour plutôt que de l'érotisme ardent : " Un doigt timide, dans mon dos, dessine un paysage à fleur de peau, comme un tatouage. La bouche frôle mon ventre, y exprimant les mots qu’il souhaite, sans attendre de réponse évidente. La chaleur inonde mon corps, je bous de cette moiteur intense que procure une joie immense. Corps à corps, je fonds dans des bras m’emportant, cœur à cœur, dans le feu extraordinaire d’un incendie volontaire."
Merci Liza ;)
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Re: Cœur à cœur

Message par Liza »

Merci de ta générosité complimenteuse... je commande un habit vert !

« Un doigt timide, dans mon dos, dessine un paysage à fleur de peau, comme un tatouage. »

Je la changerai « Un doigt timide, dans mon dos, comme un tatouage, à fleur de peau dessine un paysage. »

Je me tâte, l'ordre des mots change parfois l'harmonie du texte.
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Re: Cœur à cœur

Message par Dona »

Eh bien tu vois, moi, je préfère : "Un doigt timide dans mon dos, dessine un paysage. Comme un tatouage."

LOL ! mais on a tous nos lubies stylistiques ou sonores ;)
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