Au café du centre suite 03

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Liza
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Au café du centre suite 03

Message par Liza »

Au café du centre 03

Je m’installe à nouveau, toutefois, fini le travail, je relis notre altercation, qui n’en est même pas une. Le mec était pompette. Je n’aime pas ce genre de mec qui s’imagine être le roi parce qu’il a bu plus de bières que son copain !
— Tu as mouché le Casanova, tu as bien fait. J’allais intervenir, mais se faire rabrouer par une fille lui fait le plus grand bien. Je vais servir mes fonctionnaires.
— La journée est déjà finie, vous avez de la chance ! Qu’est-ce que je vous sers, comme d’habitude ?
— Oui, oui ! confirme l’un d’eux.
— Ils ont haussé les salaires des instits ! Nous, on peut courir, il y a deux fonctions publiques, celle qui s’aligne sur les autres pays et celle qui fait marcher le pays. Tu trouves ça juste ?
— Attends, hier ils parlaient de nous augmenter aussi !
— Tu parles, une misère, cinq ou six euros par mois ou par an !
— Ils parlent d’augmenter les impôts et la taxe sur les cartes grises, mais cela nous passera sous le nez.
— Ta femme reprend le travail bientôt ?
— Pas de suite, avant elle épuise ses droits d’arrêt-maladie avant de reprendre le collier.
— Elle a raison, faut profiter avec le peu qu’on touche. Bon, j’y vais sinon elle va râler !
— Salut Franck, quoi de neuf chez les usuriers ? questionne l’employé de la préfecture ?
— On a de plus en plus de mal à faire rentrer les impôts. Tous veulent des délais. Pourquoi usuriers ?
— Dix pour cent pour quelques jours de retard, c’est de l’usure non ! C’est le coût de mon crédit à l’année !
— Pire, renchérit un autre, tu laisses traîner un an, ça double, cent pour cent l’an, bon placement !
— Usure légale, se défend l’autre, ce n’est pas moi qui fais les lois !
— Toi tu comptes les intérêts de retard. Tiens, voilà EDF, ils font aucun cadeau non plus, j’ai une quittance d’enfer à payer.
— Je vois, tu fais partie de ceux qui veulent l’électricité pas chère, sans centrales ni lignes électriques ?
— Tout de suite les grands mots. Toi tu es au courant sans être une lumière, tu vois, tout est possible.
— Patron ! Un panaché avant que M. Trésor public me fasse péter les plombs ! commande l’électricien.

Décidément, les cafés sont des lieux où l’on boit et où l’on parle. Ma curiosité est aiguisée par ce genre de propos variés pleins d’humour décapant.
— Voilà M. le Greffier ! Alors la Bretagne, quoi de neuf avec votre aéroport, tu dois avoir du nouveau !
— Eh ! je ne suis pas dans le secret des dieux et la Bretagne est bien loin d’ici. Ça va barder, on raconte qu’ils vont respecter la décision du référendum et attaquer les travaux à la rentrée.
— Encore des gens qui prennent l’avion mais ne veulent pas d’aéroport, ajoute un autre.
— Je voudrais t’y voir ! Le bruit des jets au-dessus de ta tête, c’est l’enfer.
— Lui, ça le gênerait pas, il n’entendrait plus sa femme l’engueuler, rigole un autre.
— Il faut bien que les avions décollent de quelque part, avance un troisième avec philosophie.
— N’importe où du moment que ce n’est pas chez toi, on connaît le truc.
— Tiens, la cloche a sonné, l’école est finie, se moque l’électricien.
— Heureusement, être instit, ras le bol des gosses des autres. Patron ! un petit rosé, commande l’arrivant.
— J’ai entendu dire que tes deux rejetons ne sont pas faciles à vivre non plus, plaisante le greffier.
— Aucun, n’est facile, tu t’en fous, t’en as pas.
— C’est la question, s’il en a ou pas. Est-ce qu’il en a… ! questionne un autre.
— Vous pouvez parler, la jeunesse est fainéante… surtout les garçons. Insiste l’instit.
— Eh ! ce n’est pas moi qui dirais le contraire, précise le patron. Je n’ai jamais vu un garçon travailler d’une façon aussi assidue, tout un après-midi.

Je suppose qu’il est question de moi. Je ne travaille pas, j’espionne. Un plaisir dont je ne me lasse jamais. Je vis la vie des autres par procuration, au travers de leurs histoires et de leurs mots.
— Alors, où as-tu conduit ton préfet aujourd’hui ? demande le postier à un arrivant.
— Inaugurer des chrysanthèmes, comme d’habitude, couper le ruban de l’extension de l’hôpital.
— Si ça réduit la queue aux urgences, très utile, j’y ai passé huit heures l’autre jour.
— Normal, il fallait te desaviner avant…
— Le jour où toi t’y va, tu attends la semaine.
— Bonne affaire, les infirmières sont plus aimables et câlines que ma femme.
— Je rentre, je vais repérer un endroit idéal pour regarder le départ du tour de France, je ne veux pas louper.
— En haut de la tour des remparts qui domine le carrefour, c’est le mieux.
— Impossible, ma femme a la tige verte.
— Chouette avec la tienne qui n’est plus toute jeune, il te faut des pilules bleues.
— Vert et bleu, drôle de mélange pour décorer tes draps roses.
— Je peux savoir comment tu sais la couleur de mes draps ? insiste le bonhomme.
— Je suis ton voisin, pardi !
— Et cela te permet de visiter ma piaule et vérifier la couleur de mes toiles ! explose le type.
— Pas besoin ! Hier les draps bleus séchaient sur le fil à linge, soupire l’autre. Comme tu n’en as que deux paires, les roses habillent ta paillasse !
— Alors, ta femme a la tige verte ?
— Balance ta vertigineuse pardessus bord, tu t’en trouveras une plus jeune.
— Il aura du mal, à cinquante ans, moche et fauché comme il est, en dégotter une de vingt cinq ans, c’est un défi.
— Pourquoi vingt-cinq ans ? Il y en a des moins jeunes pas mal du tout.
— Il faut pas quitter sa femme pour une autre qui a moins de la moitié de son âge, voire beaucoup moins que ça, sinon tu vois pas la différence.
— La jeunette derrière son ordi ferait l’affaire ! souligne un troisième.
— Tu rigoles, t’as vu le matos ultramoderne qu’elle a sur la table et ce qu’elle cache sous ses fringues. Ce n’est pas le genre à s’intéresser aux antiquités coulées dans des draps roses ou bleus.
— Eh ! l’expérience, t’en fait quoi ?
— Les jeunes sont plus informés que toi sur ces choses-là. Qu’en pensez-vous jeune fille ?
— Ne vous inquiétez pas, je ne choisirai pas mon homme autour d’un abreuvoir, dis-je sans lever la tête.
— Un abreuvoir… enfin on peut bien se boire un petit coup quand on a soif, quand même !
— Sans doute, vous avez eu soif combien de fois aujourd’hui ?
— Cela ne se commande pas. Plusieurs fois et on aura encore soif d’ici ce soir.
— Tu ne bois pas toi ? demande les draps roses.
— Pas en dehors des repas. En mangeant, je bois un ou deux verres d’eau.
— De l’eau ! Cette boisson claire et fade m’attriste, salut la compagnie, à plus tard. Tu as raison, cette jeunette n’est pas une femme faite pour moi.

Afin que demain vous retrouviez intacte votre envie de lire, je tape au bas de l'écran À suivre…

Liza
Dernière modification par Liza le 04 juillet 2016, 14:59, modifié 1 fois.
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Dona
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Re: Au café du centre suite 03

Message par Dona »

Quelle truculence ! C'est vraiment fameux ! rires rires -


J'ai particulièrement apprécié le passage sur l'aéroport de Notre-Dame des Landes évidemment, moi qui ai voté NON au référendum ... :)

Et puis, cette image incroyable : "Il n'entendrait pas sa voltigeuse l'engueuler comme ça", et puis " je ne choisirai pas mon homme autour d’un abreuvoir" ,c'est bien ça non ? rires

BraVo Liza, c'est frais, c'est vivant, c'est croqué ! Une bonne compilation de petits textes humoristiques. Dis donc, tu ne perds pas ton temps toi quand tu vas dans un café ! rires
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Liza
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Re: Au café du centre suite 03

Message par Liza »

Quatre heures, c’est long et certains buveurs ont une verve particulière et intarissable. Certes, je dois expurger certains mots ou certaines expressions qui ne correspondent pas à la bonne tenue du forum. Toutefois, je garde le sens et l’essentiel. Un débat permanent entre les opinions, des avis divergents sur tous les sujets, bien mieux que la télévision et, c’est gratuit, un bouillon de culture, il suffit de savoir écouter. Je ne peux faire que cela !

Peut-être continuerai-je en imaginant les conversations ou en donnant ma propre vision des choses. Reste à savoir si les épisodes auront la même « vérité », il est permis d’en douter !
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Montparnasse
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Re: Au café du centre suite 03

Message par Montparnasse »

Plein d'humour ! Mais quelque chose me dit que tout ceci doit être « arrangé » à la sauce Liza, pour être plus percutant, pour « faire plus vrai », comme disait Céline. En tout cas, bravo ! :super: = pouce levé.
Quand les Shadoks sont tombés sur Terre, ils se sont cassés. C'est pour cette raison qu'ils ont commencé à pondre des œufs.
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